« Bonjour, comment tu t’appelles ? Moi je m’appelle Nawid. Enchanté. »

« Bonjour, comment tu t’appelles ? Moi je m’appelle Nawid. Enchanté. »

Grâce aux livres, j’ai rencontré Carole, professeure bénévole, Zimako, bâtisseur d’école, et Nawid, réfugié afghan de 19 ans, dans la jungle de Calais

Carole. Dès qu’elle a su que des Rennais voulaient venir déposer des albums pour enfants dans la jungle de Calais, elle n’a pas hésité à venir nous chercher. Elle prend soin de garer la voiture à l’écart des CRS postés à l’entrée du camp. « Ils verbalisent les voitures pour dissuader les gens de venir. » Son regard amusé trahit sa détermination. Il lui en faut bien plus pour renoncer.

Carole a le sens de l’accueil inscrit dans son ADN. Sans a priori, ni préjugés. Avec lucidité aussi. Elle a commencé par distribuer des repas aux réfugiés. Puis face à l’affluence incessante de nouveaux migrants, elle a cherché sa place pour donner du sens à son bénévolat. Aujourd’hui, elle enseigne le français à l’école laïque du chemin des dunes.

Une odeur chimique nous agresse. Nous longeons une usine classée Seveso, passons en dessous d’un pont où roulent les véhicules en direction du tunnel sous la manche. Des « bonjour, ça va ? » ponctuent notre marche, ralentie parfois des hugs échangés entre Carole et ses élèves. Puis, nous nous engageons dans un terrain vague.

Il y a encore quelques semaines, à cet endroit, des tentes abritaient des milliers de réfugiés. Où sont-ils ? « Entassés là-bas » lâche Carole en pointant au loin des containers. Les bulldozers nettoient encore l’étendue de terre qui longe la rocade mais ils ont épargné le centre d’information, l’église, la bibliothèque et l’école.

Zimako. L’école laïque du chemin des dunes possède une classe pour les enfants, une autre pour les adultes, une salle de réunion, une cuisine et des logements pour les bénévoles. Le tout est précaire, meublé avec du matériel de récupération, mais fonctionnel. Il y a même le wifi.

Un jeune homme est dans la cour pour accueillir les enfants venus en classe. La joie des retrouvailles est palpable. Son regard est taquin et les enfants le lui rendent bien. Zimako a la force tranquille des personnes capables de déplacer des montagnes sans en avoir l’air. Et le magnétisme de celles qui savent rallier les bonnes volontés à sa cause. C’est grâce à lui qu’au milieu de « nulle part en France » (1) a poussé l’école laïque du chemin des dunes. « Tous ceux qui sont prêts à faire des choses positives sont les bienvenus », assure-t-il.

Le message est passé au-delà des frontières régionales. Cette semaine d’avril, un jeune couple de Nantes, une mère et sa fille de Strasbourg, un Breton de Saint-Brieuc et une musicienne du pays de Galles sont venus épauler les bénévoles calaisiens et donner de leur temps aux réfugiés. Chacun à sa mesure.

Nawid. « Bonjour, comment tu t’appelles ? Moi je m’appelle Nawid. Enchanté. » Les réfugiés de l’école ont soif d’apprendre le français. Ils ne ratent pas l’occasion de pratiquer ce que leur « teacher » leur a appris.

Nawid vient d’Afghanistan. Son périple pour arriver jusqu’aux portes de l’Angleterre a duré quinze mois. Mais le jeune homme ne souhaite pas (ou plus ?) traverser la Manche. Il a fait une demande d’asile à la France. Chaque phrase prononcée en français est une victoire qui se lit sur son visage. Dans la conversation, on apprend que son anniversaire est le 15 avril. Il nous invite à revenir fêter ses 19 ans avec lui.

Deux jours plus tard, nous retournons à l’école. Dans nos mains, à la place des livres, un gâteau et des bougies. Nawid nous accueille avec des yeux pétillants. En Afghanistan, l’événement n’est pas célébré comme en Occident. C ‘est seulement la troisième fois qu’il le fête. A 3 ans, à 9 ans et à 19 ans.

Dans la salle de réunion, bénévoles et migrants, adultes et enfants, se mélangent, boivent un café ou un thé, discutent, jouent de la musique, improvisent une danse bretonne… Une femme kurde se fait mettre du vernis.

Nawid souffle ses bougies mais nous devons nous en aller. Il se précipite sur le gâteau. Pas question de nous laisser partir sans le partager avec nous. Les enfants n’en perdent pas une miette. C’est dur de les quitter. Après de multiples embrassades, nous partons accompagnés des « Merci, tu viens » de Nawid. Une invitation à revenir.

Nawid

(1) Nulle part en France est le titre du documentaire de Yolande Moreau, à voir absolument.

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